Le cannabidiol (CBD) est devenu un sujet de conversation courant et un produit très populaire ces dernières années. Le CBD est l’un des nombreux cannabinoïdes présents dans la plante de cannabis, mais contrairement à son cousin plus célèbre, le tétrahydrocannabinol (THC), il n’a pas d’effets psychoactifs et ne provoque pas de sensation d’euphorie ou d’altération de la perception (WHO, 2017). En raison de ses nombreuses applications potentielles dans le traitement de diverses affections médicales, le CBD a suscité l’intérêt de la communauté scientifique et du grand public. Cependant, une question essentielle demeure : le CBD est-il addictif ? Dans cet article, nous examinerons les preuves scientifiques disponibles pour répondre à cette question.
Comprendre l’addiction
Pour déterminer si le CBD est addictif, il est essentiel de comprendre ce qu’est l’addiction. L’addiction est un trouble complexe caractérisé par l’incapacité de résister à une substance ou à une activité, malgré les conséquences négatives qu’elle peut entraîner (APA, 2013). L’addiction peut être physique, psychologique ou les deux, et se manifeste généralement par une envie intense et persistante de consommer la substance en question, ainsi que par une tolérance accrue et un syndrome de sevrage en cas d’arrêt de la consommation (NIDA, 2020).
Le système endocannabinoïde et l’addiction
Le système endocannabinoïde (SEC) est un système de signalisation interne qui joue un rôle crucial dans la régulation de diverses fonctions biologiques, notamment l’humeur, la douleur, le sommeil, l’appétit et la mémoire (Pertwee, 2008). Le SEC est composé de récepteurs cannabinoïdes, notamment le récepteur CB1 et le récepteur CB2, qui sont activés par les endocannabinoïdes, des substances chimiques produites naturellement par l’organisme (Di Marzo, 2009). Les cannabinoïdes présents dans le cannabis, tels que le THC et le CBD, peuvent également interagir avec ces récepteurs, modifiant ainsi la manière dont le SEC fonctionne.
Le THC se lie directement aux récepteurs CB1, ce qui entraîne la libération de dopamine et provoque une sensation de bien-être et d’euphorie (Volkow et al., 2017). Cette interaction avec les récepteurs CB1 est la principale cause de l’addiction au cannabis. En revanche, le CBD a une faible affinité pour les récepteurs CB1 et CB2 et agit plutôt comme un modulateur allostérique négatif, inhibant la liaison du THC et d’autres agonistes aux récepteurs CB1 (Laprairie et al., 2015).
Preuves scientifiques sur l’addiction au CBD
La recherche sur l’addiction au CBD est encore limitée, mais les études disponibles suggèrent que le CBD n’est pas addictif. Dans une étude menée sur des rats , Ren et al. (2009) ont constaté que le CBD n’entraînait pas d’auto-administration, un comportement couramment associé à l’addiction chez les animaux. De plus, le CBD n’a pas augmenté la libération de dopamine, un neurotransmetteur impliqué dans la récompense et l’addiction, contrairement au THC. Ces résultats suggèrent que le CBD ne possède pas de propriétés addictives chez les animaux.
Chez les humains, les études sont également rassurantes. Une revue systématique de la littérature menée par Bergamaschi et al. (2011) a conclu que le CBD est généralement bien toléré et sûr, sans signes d’effets secondaires graves ou d’addiction. De plus, une étude menée par Hurd et al. (2019) a montré que le CBD pourrait même avoir un potentiel thérapeutique dans le traitement de la dépendance aux opioïdes. Les participants à l’étude ayant reçu du CBD ont montré une réduction des envies de consommer des opioïdes et une diminution du stress, des facteurs clés contribuant à l’addiction. Ces résultats suggèrent non seulement que le CBD n’est pas addictif, mais qu’il pourrait également aider à combattre l’addiction à d’autres substances.
L’OMS et la position des autorités sanitaires sur le CBD
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié un rapport en 2017, affirmant que le CBD ne présente pas de potentiel d’abus ou de dépendance chez les humains (WHO, 2017). Selon l’OMS, « le CBD est généralement bien toléré, avec un bon profil d’innocuité », et « il n’y a aucune preuve que le CBD ait des effets qui pourraient être associés à un potentiel d’abus ou de dépendance ». Cette position a été confirmée par le Comité d’experts de l’OMS sur la pharmacodépendance, qui a conclu que le CBD ne devrait pas être classé comme une substance contrôlée (WHO, 2018).
Conclusion
En se basant sur les preuves scientifiques actuelles, il semble que le CBD ne soit pas addictif. Les études menées sur les animaux et les humains n’ont pas montré de signes d’addiction au CBD, et l’OMS soutient également cette conclusion. De plus, le CBD pourrait même avoir un potentiel thérapeutique dans le traitement de l’addiction à d’autres substances. Cependant, la recherche sur le CBD est encore en cours, et de nouvelles études pourraient apporter des informations supplémentaires sur ses effets et son potentiel d’abus. Il est donc essentiel de rester informé et de consulter un professionnel de la santé avant d’utiliser des produits à base de CBD pour traiter des problèmes de santé.
Références
- American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (5th ed.). Arlington, VA: American Psychiatric Publishing.
- Bergamaschi, M. M., Queiroz, R. H. C., Zuardi, A. W., & Crippa, J. A. S. (2011). Safety and side effects of cannabidiol, a Cannabis sativa constituent. Current Drug Safety, 6(4), 237-249.
- Di Marzo, V. (2009). The endocannabinoid system: its general strategy of action, tools for its pharmacological manipulation and potential therapeutic exploitation. Pharmacological Research, 60(2), 77-84.
- Hurd, Y. L., Spriggs, S., Alishayev, J., Winkel, G., Gurgov, K., Kudrich, C., … & Salsitz, E. (2019). Cannabidiol for the reduction of cue-induced craving and anxiety in drug-abstinent individuals with heroin use disorder: A double-blind randomized placebo-controlled trial. American Journal of Psychiatry, 176(11), 911-922.
- Laprairie, R. B., Bagher, A. M., Kelly, M. E., & Denovan-Wright, E. M. (2015). Cannabidiol is a negative allosteric modulator of the cannabinoid CB1 receptor. British Journal of Pharmacology, 172(20), 4790-4805.
- National Institute on Drug Abuse (NIDA). (2020). The Science of Drug Use and Addiction: The Basics. Retrieved from
- Pertwee, R. G. (2008). The diverse CB1 and CB2 receptor pharmacology of three plant cannabinoids: Δ9-tetrahydrocannabinol, cannabidiol and Δ9-tetrahydrocannabivarin. British Journal of Pharmacology, 153(2), 199-215.
- Ren, Y., Whittard, J., Higuera-Matas, A., Morris, C. V., & Hurd, Y. L. (2009). Cannabidiol, a nonpsychotropic component of cannabis, inhibits cue-induced heroin seeking and normalizes discrete mesolimbic neuronal disturbances. Journal of Neuroscience, 29(47), 14764-14769.
- Volkow, N. D., Hampson, A. J., & Baler, R. D. (2017). Don’t worry, be happy: Endocannabinoids and cannabis at the intersection of stress and reward. Annual Review of Pharmacology and Toxicology, 57, 285-308.
- World Health Organization (WHO). (2017). Cannabidiol (CBD) Pre-Review Report. Agenda Item 5.2. Retrieved from https://www.who.int/medicines/access/controlled-substances/5.2_CBD.pdf
- World Health Organization (WHO). (2018). WHO Expert Committee on Drug Dependence: Thirty-ninth report. WHO Technical Report Series, No. 1006. Geneva: World Health Organization.