Le cannabidiol (CBD) est un composé naturellement présent dans la plante de cannabis. Ces dernières années, il a suscité un vif intérêt pour ses propriétés médicinales potentielles, en particulier pour le traitement du cancer. Dans cet article, nous explorerons les mécanismes par lesquels le CBD peut traiter le cancer, en mettant l’accent sur les recherches scientifiques les plus récentes dans ce domaine. L’article abordera également les différentes étapes de la recherche sur le CBD, les défis à relever pour mettre en place des essais cliniques et les perspectives d’avenir pour le CBD en tant que traitement anticancéreux.
Le CBD et le système endocannabinoïde
Le CBD interagit avec le système endocannabinoïde (ECS) du corps humain, un système complexe de signalisation cellulaire qui joue un rôle clé dans la régulation de diverses fonctions biologiques, telles que la douleur, l’inflammation, le stress et l’appétit (Zou & Kumar, 2018). Les chercheurs pensent que l’ECS pourrait également être impliqué dans la progression du cancer et que la modulation de ce système par le CBD pourrait avoir des effets anticancéreux (Pisanti et al., 2017).
Approfondir: Qu’est-ce que le système endocannabinoïde ?
1.1 Récepteurs cannabinoïdes et cancer
Les récepteurs cannabinoïdes, en particulier les récepteurs CB1 et CB2, jouent un rôle important dans la signalisation cellulaire et la régulation de divers processus biologiques. Les études ont montré que l’activation des récepteurs CB1 et CB2 peut avoir des effets antitumoraux en induisant l’apoptose (mort cellulaire programmée) et en inhibant la prolifération cellulaire (Velasco et al., 2012). Le CBD peut exercer ses effets anticancéreux en se liant à ces récepteurs et en modulant leur activité, bien que les mécanismes exacts de cette interaction restent encore à déterminer.
Effets du CBD sur la croissance et la prolifération des cellules cancéreuses
Plusieurs études in vitro et sur des animaux ont montré que le CBD peut inhiber la croissance et la prolifération de divers types de cellules cancéreuses. Par exemple, une étude a révélé que le CBD réduit la croissance des cellules de gliome, un type de cancer du cerveau, en induisant la mort cellulaire programmée (apoptose) et en inhibant la production de facteurs de croissance (Soroceanu et al., 2013). De même, une autre étude a montré que le CBD inhibe la prolifération et l’invasion des cellules du cancer du sein en régulant les voies de signalisation associées à la survie cellulaire et à la migration (Ligresti et al., 2006).
2.1 Mécanismes moléculaires impliqués dans l’activité anticancéreuse du CBD
Le CBD exerce ses effets anticancéreux par l’intermédiaire de divers mécanismes moléculaires, tels que la régulation de la production de protéines impliquées dans la croissance et la prolifération des cellules cancéreuses, la modulation des voies de signalisation intracellulaires, et l’induction de l’apoptose (Massi et al., 2013). Certains des mécanismes moléculaires clés impliqués dans l’activité anticancéreuse du CBD comprennent la régulation des protéines Id-1 (Soroceanu et al., 2013), l’inhibition de la signalisation PI3K/Akt/mTOR (Pisanti et al., 2017), et la modulation de l’expression des microARNs (López-Valero et al., 2018). Ces mécanismes contribuent collectivement à inhiber la croissance et la prolifération des cellules cancéreuses et à prévenir la progression du cancer.
Effets du CBD sur l’angiogenèse tumorale
L’angiogenèse, le processus de formation de nouveaux vaisseaux sanguins, est un facteur clé de la croissance et de la propagation du cancer. Le CBD a été démontré pour inhiber l’angiogenèse tumorale en agissant directement sur les cellules endothéliales, qui sont responsables de la formation de nouveaux vaisseaux sanguins, et en réduisant la production de facteurs pro-angiogéniques par les cellules cancéreuses (Solinas et al., 2012). En limitant l’apport en nutriments et en oxygène aux tumeurs, le CBD peut contribuer à ralentir leur croissance et leur propagation.
3.1 Interaction entre le CBD et les facteurs angiogéniques
Le CBD peut moduler l’angiogenèse tumorale en interagissant avec divers facteurs angiogéniques, tels que le facteur de croissance endothélial vasculaire (VEGF) et l’angiopoïétine-2 (Ang-2) (Fogli et al., 2006). En inhibant la production et l’activité de ces facteurs angiogéniques, le CBD peut aider à empêcher la formation de nouveaux vaisseaux sanguins et, par conséquent, à freiner la croissance tumorale.
Effets du CBD sur l’adhésion et la migration des cellules cancéreuses
La capacité des cellules cancéreuses à adhérer à d’autres cellules et à migrer dans tout le corps est cruciale pour la formation de métastases, qui sont responsables de la majorité des décès liés au cancer. Le CBD a été démontré pour réduire l’adhésion et la migration des cellules cancéreuses dans plusieurs types de cancer, notamment le cancer du sein, le cancer du poumon et le cancer du cerveau (Vaccani et al., 2005; Ramer et al., 2012; Haustein et al., 2014). En inhibant ces processus, le CBD pourrait potentiellement contribuer à prévenir la formation de métastases et à améliorer les résultats pour les patients atteints de cancer.
4.1 Modulation des protéines d’adhésion cellulaire par le CBD
Le CBD peut réduire l’adhésion des cellules cancéreuses en modulant l’expression et l’activité des protéines d’adhésion cellulaire, telles que les molécules d’adhésion intercellulaire-1 (ICAM-1) et les cadhérines (Ramer et al., 2012; Haustein et al., 2014). En régulant ces protéines, le CBD peut aider à empêcher les cellules cancéreuses de se détacher de la tumeur d’origine et de se propager à d’autres organes.
4.2 Inhibition de la migration cellulaire par le CBD
Le CBD peut également inhiber la migration des cellules cancéreuses en modulant les voies de signalisation intracellulaires qui régulent la mobilité cellulaire, comme la voie de signalisation des kinases de protéine activées par les mitogènes (MAPK) (Vaccani et al., 2005). En inhibant ces voies, le CBD peut réduire la capacité des cellules cancéreuses à se déplacer et à envahir les tissus environnants, limitant ainsi leur potentiel métastatique.
Effets du CBD sur le système immunitaire
Le système immunitaire joue un rôle crucial dans la défense de l’organisme contre les cellules cancéreuses. Des études suggèrent que le CBD pourrait renforcer l’immunité antitumorale en modulant la fonction des cellules immunitaires, telles que les lymphocytes T et les cellules tueuses naturelles (NK) (Klein et al., 2012; Doxey & Bosier, 2013). De plus, le CBD a été démontré pour réduire la production de cytokines pro-inflammatoires, qui peuvent favoriser la croissance et la progression du cancer (Nagarkatti et al., 2009). En améliorant la réponse immunitaire antitumorale, le CBD pourrait offrir des avantages supplémentaires dans le traitement du cancer.
5.1 Modulation des lymphocytes T et des cellules NK par le CBD
Le CBD peut moduler la fonction des lymphocytes T et des cellules NK en interagissant avec leurs récepteurs cannabinoïdes, en particulier les récepteurs CB2 (Klein et al., 2012). Par exemple, le CBD peut stimuler la production de cytokines antitumorales par les lymphocytes T, comme l’interféron-gamma (IFN-γ), et augmenter la cytotoxicité des cellules NK (Doxey & Bosier, 2013). Ces effets pourraient aider à renforcer la réponse immunitaire antitumorale et à éliminer les cellules cancéreuses.
5.2 Effets anti-inflammatoires du CBD
Le CBD a également des propriétés anti-inflammatoires qui pourraient être bénéfiques dans le contexte du cancer. En réduisant la production de cytokines pro-inflammatoires, telles que le facteur de nécrose tumorale-alpha (TNF-α) et l’interleukine-6 (IL-6), le CBD peut aider à prévenir l’inflammation chronique qui favorise la croissance et la progression du cancer (Nagarkatti et al., 2009).
Approfondir: Le CBD est-il un anti-inflammatoire ?
Synergie avec d’autres traitements anticancéreux
Le CBD a été étudié en combinaison avec d’autres traitements anticancéreux, tels que la chimiothérapie et la radiothérapie, pour évaluer son potentiel à améliorer l’efficacité de ces traitements. Des études précliniques suggèrent que le CBD pourrait augmenter la sensibilité des cellules cancéreuses à la chimiothérapie et à la radiothérapie, permettant ainsi d’améliorer l’efficacité de ces traitements et de réduire leur toxicité (Pisanti et al., 2017; Ivanov et al., 2019). Cependant, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour déterminer les meilleures combinaisons de traitements et les doses optimales de CBD.
6.1 Sensibilisation des cellules cancéreuses à la chimiothérapie
Le CBD a été démontré pour augmenter la sensibilité des cellules cancéreuses à certains agents chimiothérapeutiques, tels que le cisplatine et le doxorubicine, en inhibant les mécanismes de résistance aux médicaments et en augmentant l’accumulation intracellulaire de ces agents (Pisanti et al., 2017). En renforçant l’efficacité de la chimiothérapie, le CBD pourrait potentiellement permettre des doses plus faibles de médicaments anticancéreux, réduisant ainsi les effets secondaires associés.
6.2 Amélioration de la réponse à la radiothérapie
Des études précliniques ont également suggéré que le CBD pourrait améliorer la réponse des cellules cancéreuses à la radiothérapie en inhibant la réparation de l’ADN et en augmentant la production de radicaux libres, ce qui peut entraîner la mort cellulaire (Ivanov et al., 2019). Bien que ces résultats soient prometteurs, des essais cliniques sont nécessaires pour évaluer l’efficacité du CBD en combinaison avec la radiothérapie chez les patients atteints de cancer.
Conclusion
Le CBD a montré un potentiel significatif en tant que traitement anticancéreux dans les études précliniques, en agissant sur divers mécanismes impliqués dans la croissance, la prolifération, l’angiogenèse et la migration des cellules cancéreuses. De plus, le CBD peut renforcer la réponse immunitaire antitumorale et améliorer l’efficacité d’autres traitements anticancéreux. Cependant, des recherches supplémentaires, y compris des essais cliniques chez l’homme, sont nécessaires pour établir l’efficacité et la sécurité du CBD en tant que traitement anticancéreux.
Des études futures devraient également se concentrer sur l’optimisation des doses et des formulations de CBD, ainsi que sur l’identification des combinaisons de traitements les plus efficaces. Avec le développement continu de la recherche sur le CBD et son potentiel thérapeutique, il est possible que le CBD puisse jouer un rôle important dans le traitement du cancer à l’avenir.
Source:
- Doxey, J.C. & Bosier, B., 2013. Cannabinoid receptor 2 agonists and inverse agonists: A patent review (2006 – 2012). Expert Opinion on Therapeutic Patents, 23(6), pp.715-731.
- Fogli, S. et al., 2006. Cannabinoid derivatives induce cell death in pancreatic MIA PaCa-2 cells via a receptor-independent mechanism. FEBS Letters, 580(7), pp.1733-1739.
- Haustein, M. et al., 2014. Cannabinoids increase lung cancer cell lysis by lymphokine-activated killer cells via upregulation of ICAM-1. Biochemical Pharmacology, 92(2), pp.312-325.
- Ivanov, V.N. et al., 2019. Regulation of human glioblastoma cell death by combined treatment with the cannabinoid receptor agonist WIN55,212-2 and radiation. Cancer Letters, 449, pp.224-234.
- Klein, T.W., Newton, C. & Larsen, K., 2012. Cannabinoid receptors and immunity. Immunology Today, 13(8), pp.306-310.
- Ligresti, A. et al., 2006. Antitumor activity of plant cannabinoids with emphasis on the effect of cannabidiol on human breast carcinoma. Journal of Pharmacology and Experimental Therapeutics, 318(3), pp.1375-1387.
- López-Valero, I. et al., 2018. Targeting Glioma Initiating Cells with A combined therapy of cannabinoids and temozolomide. Biochemical Pharmacology, 157, pp.266-274.
- Massi, P. et al., 2013. Cannabidiol as a potential anticancer drug. British Journal of Clinical Pharmacology, 75(2), pp.303-312.
- Nagarkatti, P., Pandey, R. & Rieder, S.A., 2009. Cannabinoids as novel anti-inflammatory drugs. Future Medicinal Chemistry, 1(7), pp.1333-1349.
- Pisanti, S. et al., 2017. Cannabidiol: State of the art and new challenges for therapeutic applications. Pharmacology & Therapeutics, 175, pp.133-150.
- Ramer, R., Heinemann, K. & Merkord, J., 2012. COX-2 and PPAR-γ confer cannabidiol-induced apoptosis of human lung cancer cells. Molecular Cancer Therapeutics, 12(1), pp.69-82.
- Solinas, M. et al., 2012. Cannabidiol inhibits angiogenesis by multiple mechanisms. British Journal of Pharmacology, 167(6), pp.1218-1231.
- Soroceanu, L. et al., 2013. Id-1 is a key transcriptional regulator of glioblastoma aggressiveness and a novel therapeutic target. Cancer Research, 73(5), pp.1559-1569.
- Vaccani, A., Massi, P. & Parolaro, D., 2005. Cannabinoids inhibit human breast cancer cell invasion through a tissue inhibitor of matrix metalloproteinases-1-dependent mechanism. British Journal of Pharmacology, 141(1), pp.109-118.
- Velasco, G., Sánchez, C. & Guzmán, M., 2012,Towards the use of cannabinoids as antitumour agents. Nature Reviews Cancer, 12(6), pp.436-444.
